Confronté à une crise multiforme — sécheresses à répétition, effondrement du cheptel, flambée des prix des viandes rouges — le secteur de l’élevage au Maroc est à un tournant décisif. Le ministère de l’Agriculture entame l’élaboration d’une nouvelle stratégie nationale pour le développement durable de l’élevage, en partenariat avec l’Organisation des Nations Unies pour l’Alimentation et l’Agriculture (FAO). Ce chantier ambitieux s’inscrit dans le cadre de la dynamique Génération Green 2020-2030.

Avec un budget de 137.000 dollars alloué par la FAO dans le cadre du programme de coopération technique signé en octobre 2024, cette initiative vise à jeter les bases d’un élevage moderne, durable et mieux structuré. Elle comprend deux volets essentiels : l’élaboration d’une Feuille de route nationale pour le développement de l’élevage durable, et la mise en place d’un cadre juridique unifié, appelé à remplacer une législation devenue obsolète.

La nécessité de cette refonte n’est plus à démontrer. Sept années consécutives de sécheresse ont ravagé les pâturages, contraignant de nombreux éleveurs, notamment les petits et moyens, à se séparer de leurs troupeaux. Le résultat est alarmant : un effondrement de 38 % du cheptel national, avec à la clé une chute brutale de la production animale et une explosion des prix des viandes rouges.

Face à cette hémorragie, des mesures d’urgence ont été mises en place, comme la distribution de subventions pour l’achat d’aliments pour bétail. Mais ces réponses ponctuelles ne suffisent plus. Le défi est désormais structurel. Il s’agit de repenser l’ensemble de la chaîne de valeur de l’élevage en intégrant les impératifs de résilience climatique, de performance économique et de durabilité environnementale.

La future stratégie entend ainsi promouvoir des pratiques d’élevage adaptées au contexte climatique, miser sur une génétique animale plus résistante à la sécheresse et encourager la recherche et l’innovation dans le domaine. Un travail de fond sera également mené sur le plan réglementaire pour harmoniser les textes, aligner les politiques nationales sur les standards internationaux et intégrer les attentes des acteurs de la filière.

Cette réforme de l’élevage s’inscrit dans une démarche plus large. En parallèle, le ministère a engagé la révision des 19 contrats-programmes agricoles signés en 2023 avec les interprofessions, afin de mieux répondre aux nouvelles réalités imposées par le changement climatique et le stress hydrique permanent. Une première phase de travail interne est en cours, avant l’implication des interprofessions dans la redéfinition des objectifs à l’horizon 2030.

À l’heure où l’eau devient une ressource critique et où les modèles agricoles sont remis en question, le Maroc semble vouloir reprendre la main sur l’avenir de son élevage. La feuille de route en gestation pourrait bien être la clé de voûte d’un renouveau durable et intelligent du secteur.

Avec Le Matin

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