Alors que la France prévoit l’installation de plus de 700 data centers d’ici 2033, une proposition de loi portée par le sénateur David Ros relance le débat sur la régulation fiscale de ces infrastructures énergivores. Son objectif ? Instaurer une taxation progressive afin de responsabiliser les opérateurs face à leur impact environnemental, notamment en matière de consommation d’eau et d’énergie.
Une redevance sur l’eau pour les data centers les plus gourmands
Les data centers, indispensables au stockage et au traitement des données numériques, consomment d’importantes quantités d’eau pour refroidir leurs serveurs et maintenir des températures optimales. En 2022, leur consommation a atteint 482 000 m³ d’eau potable, soit une augmentation de 20 % par rapport à 2021, selon une étude conjointe de l’Arcep et de l’ADEME.
Face à cette pression sur les ressources hydriques, la proposition de loi prévoit une redevance progressive sur l’eau prélevée, oscillant entre 1,53 € et 3,90 € par mètre cube en fonction du niveau de consommation. Cette mesure vise à inciter les opérateurs à adopter des solutions de refroidissement plus écologiques, comme le recours à l’air extérieur ou à des liquides non conducteurs pour l’immersion des serveurs.
Taxer les nuisances et soutenir les collectivités locales
Outre la question de l’eau, David Ros propose également une taxe spécifique sur les data centers pour compenser leur impact territorial. Bien que représentant plusieurs dizaines de milliards d’euros d’investissements, ces infrastructures créent peu d’emplois et entraînent des nuisances comme l’artificialisation des sols et la pression foncière.
Actuellement, 58 % des data centers français sont implantés en Île-de-France, notamment sur le plateau de Saclay. Le sénateur souhaite encourager une meilleure répartition sur le territoire en incitant à des implantations en région, où l’impact serait plus équilibré et les tensions sur les réseaux électriques moins marquées.
Valoriser la chaleur fatale et encourager l’innovation
Autre levier envisagé : la récupération de la chaleur fatale produite par les serveurs informatiques. Cette énergie, souvent gaspillée, pourrait être réutilisée pour chauffer des infrastructures publiques, comme les piscines municipales, les hôpitaux ou les réseaux de chaleur urbains.
Le centre aquatique olympique de Saint-Denis, chauffé grâce à un data center voisin, illustre le potentiel de cette approche. Pour aller plus loin, David Ros propose la création d’un programme national de recherche et d’innovation dédié aux infrastructures numériques. L’objectif ? Encourager la collaboration entre les data centers privés, les universités et les start-ups pour développer des technologies plus durables.
Un enjeu écologique et économique
Cette proposition de loi s’inscrit dans un mouvement global de régulation des géants du numérique et de réduction de leur empreinte écologique. Toutefois, elle soulève des interrogations sur son impact potentiel sur l’attractivité de la France pour les entreprises technologiques.
Le texte, encore en discussion, devrait être examiné par le groupe socialiste la semaine prochaine. Reste à savoir si le gouvernement, malgré les récents investissements annoncés lors du Sommet de l’IA, choisira de soutenir cette initiative visant à concilier innovation et responsabilité environnementale.