À quelques kilomètres de Tétouan, la centrale éolienne de Koudia Al Baida entame une seconde vie. Lancée en 1999, cette infrastructure historique du paysage énergétique marocain vient de faire l’objet d’un chantier de transformation d’envergure, qui illustre la nouvelle ambition verte du Royaume. Portée par Masen et EDF Renouvelables, et pilotée techniquement par Siemens Gamesa, l’opération a permis de doubler la puissance installée du site – désormais portée à 100 mégawatts – tout en divisant par plus de quatre le nombre de turbines. Un projet pionnier à l’échelle du continent.
Technologie de pointe et efficacité énergétique
L’ancien parc comptait 90 éoliennes. Il n’en reste que 20 aujourd’hui. Mais ces dernières, issues de la dernière génération, sont capables à elles seules de produire jusqu’à neuf fois plus d’énergie que leurs prédécesseures. Résultat : une capacité doublée, une empreinte foncière réduite, une logistique allégée et des coûts de maintenance significativement abaissés.
Siemens Gamesa parle d’un « projet de repowering le plus ambitieux jamais réalisé en Afrique ». Il incarne une tendance globale : au lieu de reconstruire à neuf, de plus en plus de pays privilégient la modernisation des parcs vieillissants, une stratégie jugée plus rationnelle. À l’échelle mondiale, le potentiel de repowering est estimé à 89 gigawatts d’ici 2026, alors que seulement 11 gigawatts sont actuellement programmés.
Un modèle de circularité environnementale
La transformation du parc ne s’est pas limitée à la performance énergétique. Elle a aussi intégré une démarche responsable quant à la fin de vie des équipements. Les composants métalliques (mâts, nacelles, alternateurs…) ont été réutilisés ou recyclés localement. Les pales, plus complexes, ont été broyées sur place pour être valorisées dans la production de ciment.
Cette gestion rigoureuse des déchets industriels, encore rare dans l’univers des énergies renouvelables, illustre une nouvelle approche du développement durable où l’économie circulaire devient une composante stratégique. Ce sont également les fameuses dépenses d’abandon — souvent ignorées dans les projets énergétiques classiques — qui ont été ici anticipées et intégrées.
Transmettre le savoir pour ancrer l’avenir
Mais Koudia Al Baida ne se contente pas de produire de l’énergie propre. Elle devient aussi un outil de formation et de transfert de compétences. Onze éoliennes complètes ont été offertes à des établissements marocains, dont l’université de Tétouan, l’Ifmeree de Tanger et l’OFPPT. Les étudiants peuvent désormais manipuler de véritables composants industriels, favorisant une pédagogie par la pratique.
À l’heure où le Maroc investit massivement dans les énergies renouvelables pour accélérer sa transition énergétique, cette initiative confirme que le capital humain est au cœur de la stratégie nationale. Elle inscrit la montée en puissance des renouvelables dans une logique de souveraineté technologique et de formation locale.
Financement hybride et coopération internationale
Ce projet de repowering n’aurait pas vu le jour sans un montage financier innovant : un cofinancement entre la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD) et un consortium de banques marocaines et internationales. Siemens Gamesa, dans le cadre d’un contrat EPC (ingénierie, approvisionnement, construction), a assuré l’ensemble du déploiement technique.
Ce type de montage témoigne de la capacité du Maroc à mobiliser des acteurs mondiaux pour des projets complexes, tout en veillant à l’inclusion de filières et de savoir-faire locaux.
Koudia Al Baida, symbole d’une nouvelle ère
En réussissant à conjuguer performance énergétique, respect environnemental, ancrage local et innovation technologique, la centrale éolienne de Koudia Al Baida devient un modèle pour toute l’Afrique. Elle incarne une vision dans laquelle chaque kilowatt produit porte aussi un message : celui d’un développement durable, pragmatique et inclusif.
Avec Barlamane