Alors que le continent africain subit de plein fouet les effets du dérèglement climatique, un constat alarmant s’impose : en 2025, près de 30 % des revenus africains devraient être consacrés au remboursement de la “dette climatique”, selon le rapport State of Africa’s Environment 2025 publié par le think tank indien Centre for Science and Environment (CSE). Une double peine pour un continent faiblement émetteur, mais parmi les plus durement frappés.
Une planète qui brûle, un continent qui s’assèche
L’Afrique se réchauffe plus vite que la moyenne mondiale. L’année 2024 a été la plus chaude jamais enregistrée sur le continent, marquée par des vagues de chaleur extrêmes, la raréfaction de l’eau et une recrudescence des catastrophes naturelles.
Entre 2021 et 2025, plus de 400 millions d’Africains ont été touchés par des phénomènes climatiques liés à l’eau ou à la météo, entraînant plus de 41 000 décès. Le rapport indique aussi que 222 millions de personnes ont été déplacées à cause des sécheresses, inondations et tempêtes, et que ce chiffre pourrait grimper à 10 % de la population en Afrique de l’Est d’ici 2050.
La faim et la soif gagnent du terrain
La hausse des températures menace directement la sécurité alimentaire. Si le réchauffement atteint 2°C, plus de la moitié des Africains risqueraient la sous-alimentation. Les rendements agricoles chutent déjà de 18 %, fragilisant des millions d’exploitations rurales et accentuant la dépendance alimentaire du continent.
Le stress hydrique, lui, atteint un niveau critique : 700 millions d’Africains pourraient être déplacés d’ici 2030 à cause du manque d’eau. Les écarts mondiaux de disponibilité hydrique s’élèvent à 458 milliards de m³ par an, un chiffre appelé à croître avec la hausse des températures.
Des impacts sanitaires explosifs
Les effets du changement climatique ne se limitent plus aux récoltes ou aux déplacements : ils touchent aussi la santé publique. Les cas de paludisme ont progressé de 14 % en un an, et ceux de choléra ont bondi de 125 %. En 2030, entre 147 et 171 millions de personnes supplémentaires pourraient être exposées au risque de malaria, selon le rapport.
Une injustice financière criante
Le CSE dénonce une injustice climatique majeure : alors que l’Afrique ne représente qu’une faible part des émissions mondiales, elle en paie le prix fort. Les pays africains doivent mobiliser près d’un tiers de leurs revenus pour rembourser une dette contractée auprès d’institutions internationales, au détriment des investissements dans la résilience et la transition verte.
Dans certains États, comme le Ghana, la Zambie ou le Cameroun, le service de la dette extérieure dépasse jusqu’à 50 fois les pertes engendrées par les catastrophes climatiques.
Le paradoxe du marché carbone
L’Afrique abrite environ 20 % des projets mondiaux de crédits carbone, représentant près de 6 milliards de dollars d’investissements entre 2013 et 2023. Pourtant, les retombées locales restent dérisoires. Les communautés les plus exposées ne profitent que marginalement des revenus générés par ces programmes, souvent pilotés par des acteurs étrangers.
Alors que la planète franchit un à un les seuils critiques de l’Accord de Paris, le rapport du CSE sonne comme un avertissement : si rien n’est fait pour alléger la dette climatique du continent, c’est tout le modèle mondial de justice environnementale qui vacillera.
Pour l’Afrique, la question n’est plus de savoir comment s’adapter au réchauffement, mais comment survivre sans être étranglée financièrement par un système qu’elle n’a pas contribué à créer.



