Malgré la cession stratégique de sa filiale marocaine à Managem, Sound Energy termine l’année 2024 sur une perte nette de 122 millions de livres sterling. Une dépréciation d’actifs au Maroc, notamment à Sidi Moktar, pèse lourdement sur les comptes du groupe britannique d’exploration gazière.
Une cession salvatrice, mais insuffisante
Le transfert de Sound Energy Morocco East Ltd (SEME) à Managem, portant sur la concession de Tendrara ainsi que les permis d’Anoual et du Grand Tendrara, a permis au groupe de récupérer une partie de ses investissements historiques. Cette transaction s’est accompagnée d’un apport en liquidités couvrant les dépenses depuis début 2022, assorti d’un droit de participation gratuit aux futurs forages.
Malgré ce bol d’air financier, les comptes restent dans le rouge. Une importante charge de dépréciation comptable liée à la revalorisation d’actifs non transférés a creusé les pertes. Ces ajustements, exigés par la divergence entre la valeur inscrite au bilan et la valeur recouvrable des sites restants, expliquent l’ampleur du déficit enregistré.
Endettement maintenu et retard industriel
Un financement transitoire octroyé par 2i Partners avait momentanément renforcé la trésorerie, mais ce crédit-pont a été remboursé avant la fin de l’année, intérêts inclus. L’entreprise reste toutefois sous le poids d’une dette importante, avec des intérêts courus atteignant près de 569 000 livres.
L’autre coup dur vient du projet de liquéfaction de gaz naturel à Tendrara, pilier du repositionnement de Sound Energy. Ce chantier, censé marquer une étape clé, souffre de retards liés à la logistique et au génie civil. À fin décembre, seule la cuve de stockage était opérationnelle, les autres éléments critiques étant encore en cours d’acheminement ou d’installation.
Nouvelle dynamique sous conduite marocaine
Depuis la prise de contrôle par Managem, les opérations sur le terrain sont désormais intégralement dirigées par le groupe marocain. Ce dernier s’appuie sur ses ressources internes et sur des anciens de SEME pour assurer la continuité. Sound Energy conserve un rôle d’accompagnement technique.
Quant au développement de la phase 2, portant sur la connexion au réseau gazier national via pipeline, il reste conditionné à l’actualisation de l’étude d’ingénierie afin d’intégrer les nouveaux coûts de 2025. Un accord de financement a été signé avec Managem, et un contrat de vente du gaz est en place avec l’ONEE. Toutefois, le financement principal d’Attijariwafa bank reste suspendu à certaines conditions.
Exploration en stand-by et gouvernance resserrée
Côté exploration, les permis d’Anoual et du Grand Tendrara sont en attente de prorogation administrative. Aucun forage ne pourra être lancé sans aval ministériel. Deux puits sont prévus à la charge de Managem, avec une implication technique de Sound Energy.
À Sidi Moktar, où la filiale SEMS reste à la manœuvre, une campagne sismique est projetée entre 2025 et 2026. Les obstacles restent néanmoins nombreux, entre lourdeurs bureaucratiques et logistique incertaine.
Le groupe a aussi connu une recomposition de sa gouvernance. Simon Ashby-Rudd a quitté ses fonctions après l’annonce de la cession. Mohammed Seghiri, autre figure clé, a rejoint Managem pour assurer la continuité. Le conseil d’administration, désormais réduit à trois membres dont un seul exécutif, reflète cette phase de transition.
Engagement local et ambitions à long terme
Sur le terrain social, Sound Energy affirme maintenir une démarche responsable. Une conduite d’eau a été installée pour desservir une école rurale, et la main-d’œuvre locale est priorisée chaque fois que possible.
En matière de sécurité et d’environnement, le groupe se montre plus vigilant. Deux incidents ont été enregistrés en 2024 : un accident du travail et un accident routier. Les émissions de CO₂ ont été limitées à 936 tonnes équivalent carbone, essentiellement dues aux travaux à Tendrara. Une étude de captation de CO₂ est en cours.
Parallèlement, la société poursuit ses efforts de diversification. Un projet d’étude sur le potentiel d’hydrogène naturel et d’hélium au Maroc, mené avec Getech, devrait livrer ses premiers résultats en 2025.
Vers une nouvelle phase stratégique
Pour rassurer ses actionnaires, la direction souligne la solidité de son modèle malgré les turbulences. L’émission de 117,5 millions d’actions a permis de solder les obligations convertibles de 2023. À l’avenir, Sound Energy compte rationaliser ses dépenses, valoriser ses actifs restants et se positionner sur de nouvelles opportunités de croissance.
« Notre priorité reste de créer des revenus durables tout en maintenant une discipline financière rigoureuse et une gouvernance exemplaire », a déclaré Graham Lyon, président exécutif du groupe.
Avec Barlamane