Dans les forêts du Moyen Atlas, notamment dans la province d’Ifrane, la lutte contre l’abattage illégal d’arbres semble se heurter à des résistances bien plus profondes que celles des seules scies clandestines. Dernier exemple en date : deux agents forestiers sanctionnés après avoir tenté d’intercepter un camion transportant du bois volé.
Une sanction à contre-sens
Selon le quotidien Al Akhbar, les deux agents, relevant de l’Agence nationale des eaux et forêts, ont été mutés dans d’autres provinces quelques jours seulement après avoir mené une opération de terrain qui révélait l’ampleur du trafic de bois de cèdre dans la région. L’un a été affecté à Bouarfa, l’autre à Taounate. Ces décisions ont été prises sans enquête préalable ni passage devant une commission disciplinaire, suscitant l’indignation de plusieurs observateurs.
Une opération révélatrice d’un trafic structuré
Les faits remontent à une alerte reçue par l’un des agents, signalant le chargement illégal de bois dans une commune d’Ifrane. Après avoir tenté, en vain, de joindre leur supérieur, les deux fonctionnaires se sont tournés vers le directeur provincial de l’Agence, qui les a orientés vers le parquet. Ce dernier a ordonné l’intervention de la Gendarmerie royale.
S’en est suivie une course-poursuite, interrompue par l’intervention d’un individu qui a bloqué les agents forestiers, les menaçant au passage et affirmant être protégé par des réseaux influents. Le camion a tout de même été saisi, mais a ensuite été restitué à son propriétaire, sur la base d’informations jugées douteuses. Le lendemain, une zone proche du lieu des faits présentait des traces d’abattage massif.
Climat de défiance dans les rangs
Cette affaire soulève plusieurs interrogations : comment expliquer que des agents soient sanctionnés pour avoir fait leur travail ? Pourquoi de telles opérations finissent-elles par être étouffées ? Et surtout, qui protège les réseaux de coupe illégale ?
Dans un contexte de dérèglement climatique et de pressions croissantes sur les ressources naturelles, la protection de la cédraie marocaine – l’une des plus importantes de la Méditerranée – devient un enjeu majeur. Mais encore faut-il que ceux qui en ont la charge soient réellement soutenus dans leur mission.
L’intervention du ministère de l’Agriculture a été sollicitée par les deux agents pour mettre fin à leur détachement auprès de l’Agence. Une manière pour eux de dénoncer un système où l’impunité semble parfois mieux protégée que la forêt elle-même.