Alors que les usages de l’intelligence artificielle explosent, un rapport publié par l’Unesco en collaboration avec l’University College London (UCL) tire la sonnette d’alarme : les IA, notamment les modèles génératifs, sont devenues de véritables gouffres à électricité… et à eau. Leur consommation d’eau pourrait dépasser celle du Danemark d’ici 2027, atteignant entre 4,2 et 6,6 milliards de mètres cubes.
Une croissance exponentielle des besoins
Les besoins en énergie des infrastructures qui font tourner les IA (en particulier les grands modèles de langage, ou LLM) connaissent une hausse vertigineuse : +12 % par an depuis 2017, selon l’Agence internationale de l’énergie. En 2024, les datacenters ont consommé 415 TWh, soit presque autant que toute la France (449 TWh). Et selon l’Unesco, ces seuls LLM représentent déjà 1,5 % de la consommation électrique mondiale.
Mais l’empreinte environnementale ne s’arrête pas là. L’eau, indispensable pour refroidir les serveurs et construire les infrastructures, devient une ressource critique. Des territoires comme l’Arizona voient déjà des logements privés d’électricité pour permettre aux datacenters de fonctionner. Des centrales à gaz doivent être agrandies, au prix d’une pollution accrue pour les riverains.
Trois leviers pour rendre l’IA plus sobre
Face à cette situation, les chercheurs de l’UCL proposent trois pistes majeures, testées sur des modèles open source :
- Utiliser des petits modèles spécialisés plutôt qu’un seul modèle généraliste : cela permettrait de réduire la consommation jusqu’à 90 %. Un modèle géant est souvent sollicité pour des tâches simples, provoquant une surconsommation inutile.
- Raccourcir les requêtes et les réponses : un prompt plus concis, accompagné d’une réponse synthétique, pourrait réduire jusqu’à 50 % la consommation électrique liée à une interaction.
- Compresser les modèles grâce à la quantification : cette technique d’optimisation réduit la taille du modèle sans perte de performance, diminuant ainsi la consommation jusqu’à 44 %.
Une crise écologique à venir ?
La course à l’IA s’accompagne d’une pression inédite sur les ressources, notamment dans les pays les plus engagés dans le développement technologique. Le rapport invite à une remise en question de l’architecture actuelle de l’IA, et à un choix stratégique entre performance brute et sobriété.
Pour l’Unesco, il ne s’agit pas de freiner l’innovation, mais de la réorienter vers des usages responsables. L’enjeu est clair : si l’IA peut répondre à des défis mondiaux, elle ne doit pas en créer de nouveaux en épuisant les ressources naturelles.