Nichée à une vingtaine de kilomètres au nord-est de Rabat, dans le prolongement de la vaste forêt de Maâmoura, la forêt de Sala Al Jadida a retrouvé, grâce aux dernières pluies, une verdure luxuriante. Ce cadre naturel de 340 hectares attire chaque jour familles, sportifs et amoureux de la nature en quête de calme et de fraîcheur. Mais derrière ce décor bucolique, se cache un déséquilibre préoccupant.
Un espace naturel menacé par la pression humaine
La popularité croissante de cette forêt urbaine n’est pas sans conséquences. Si elle constitue un précieux refuge pour les habitants de la région, elle subit une pression intense, aggravée par les effets du changement climatique : baisse des précipitations, élévation des températures, et épisodes de sécheresse prolongée. Cette double menace — climatique et anthropique — fragilise l’écosystème.
Les comportements inciviques de certains visiteurs aggravent la situation. Déchets abandonnés, stationnement anarchique à l’intérieur même de la forêt, piétinement du sol : les dommages sont visibles et inquiétants. Pour Brahim Aboulabbas, président de l’Association marocaine pour l’écotourisme et la protection de la nature, « ce sont les amoureux de la nature eux-mêmes qui nuisent le plus à ce milieu fragile ». Il souligne que dans les conditions climatiques actuelles, la régénération naturelle des arbres devient un véritable défi.
Une prise de conscience en marche
Face à l’urgence, des mesures concrètes ont été engagées. En février, l’Agence nationale des eaux et forêts (ANEF) a lancé un programme d’aménagement visant à restaurer et sécuriser la forêt. Cette stratégie s’articule autour de trois objectifs : préserver l’écosystème, renforcer la sécurité des visiteurs, et améliorer la gestion des infrastructures.
Doté d’un budget de 15 millions de dirhams, ce projet est cofinancé par l’ANEF et le Conseil régional de Rabat-Salé-Kénitra dans le cadre du Programme de développement régional (PDR) 2022-2027. Il est également soutenu par le programme « Climat – Appui aux contributions déterminées au niveau national », financé par la Banque mondiale, qui ambitionne d’aménager 11 forêts urbaines et périurbaines à travers le pays d’ici 2027.
Un engagement collectif essentiel
Si ces efforts institutionnels sont louables, ils ne suffiront pas sans une mobilisation citoyenne. L’avenir de la forêt dépend avant tout de la responsabilité de ses usagers. Comme le rappelle Ahmed, habitué des lieux, « les détritus laissés après les pique-niques nuisent à la beauté du site et à l’expérience des autres visiteurs ».
Préserver ce poumon vert suppose donc un changement de comportement. Sensibilisation, éducation environnementale, respect des règles de fréquentation : autant de leviers à activer pour inscrire durablement cet espace dans une logique de conservation.
La forêt de Sala Al Jadida, comme tant d’autres espaces naturels périurbains, est un bien commun. Son équilibre repose sur une écologie partagée, où chaque geste compte. Les récentes pluies ont redonné vie à son paysage, mais seule une vigilance constante permettra de sauvegarder ce patrimoine naturel pour les générations futures.
Avec MAP Ecology