L’assainissement liquide entre dans une phase d’accélération au Maroc. Le ministre de l’Intérieur, Abdelouafi Laftit, a annoncé devant les parlementaires une refonte ambitieuse du calendrier initial, avec l’objectif de généraliser le raccordement urbain dès 2029, soit cinq ans avant l’échéance prévue.
Cette révision s’inscrit dans une volonté forte de rattrapage des inégalités territoriales. Une fois les centres urbains couverts, les efforts seront redirigés vers le monde rural, où le déficit reste flagrant. En parallèle, les projets lancés dans le cadre des Assises nationales de la régionalisation avancée verront leur cadence renforcée.
Un budget global de 56 milliards de dirhams est mobilisé pour la période 2025-2034. Sur ce montant, 27 milliards permettront d’achever les 389 projets en cours, tandis que 29 milliards financeront 694 nouvelles opérations, avec une attention particulière portée à la réutilisation des eaux usées traitées.
Sur ce point, les progrès sont notables : en 2024, le pays a recyclé 53 millions de m³ d’eaux usées, principalement destinées à l’irrigation d’espaces verts et de parcours de golf dans 16 collectivités. Le dispositif sera élargi à 18 golfs et 40 communes, avec l’introduction d’usages industriels.
Depuis 2019, les investissements dans l’assainissement ont cumulé près de 49 milliards de dirhams, dont plus de la moitié déjà exécutée. L’État a contribué via un fonds dédié à hauteur de 17,7 milliards de dirhams, et les collectivités territoriales ont apporté 3,1 milliards à travers leur part de TVA.
Ces engagements ont permis de doter 223 villes et centres urbains d’un réseau d’assainissement opérationnel, couvrant 21 millions d’habitants. À ce jour, 72 chantiers sont en cours et 90 autres sont programmés, avec un taux de raccordement urbain déjà proche des 85 %.
Mais en zone rurale, le retard reste criant : seuls 43 centres sur 1.207 sont équipés, couvrant à peine 105.000 habitants. Le ministère a prévu l’extension du réseau à 170 centres supplémentaires, ce qui porterait la couverture à environ 420.000 personnes.
Le Programme national intégré d’assainissement liquide et de réutilisation des eaux usées, lancé en 2019, fixe des cibles ambitieuses : 90 % de raccordement urbain, 80 % en zone rurale, et une réutilisation de 100 millions de m³ d’eaux usées dès 2027 — avec un bond attendu à 537 millions de m³ à l’horizon 2040.
L’enjeu est clair : faire de l’assainissement liquide un droit universel, et non un privilège réservé aux villes.
Avec L’Économiste