Alors que l’intelligence artificielle (IA) connaît une expansion sans précédent, ses retombées environnementales suscitent une inquiétude croissante. Un rapport conjoint de l’Union internationale des télécommunications (UIT) et de la World Benchmarking Alliance alerte sur la flambée des émissions de carbone du secteur numérique, tirée par la montée en puissance des centres de données et infrastructures technologiques.
Une consommation énergétique qui dépasse la moyenne mondiale
Entre 2017 et 2023, la consommation d’électricité des centres de données a augmenté de 12 % par an — un rythme quatre fois supérieur à la croissance de la demande mondiale d’énergie. Ces infrastructures, essentielles au développement et à l’entraînement des modèles d’IA, représentent désormais un gouffre énergétique majeur.
Les données recueillies dans le rapport révèlent que 166 entreprises numériques ont généré, à elles seules, 0,8 % des émissions mondiales liées à l’énergie en 2023. Dix d’entre elles concentrent la moitié des 581 térawattheures consommés par l’ensemble du secteur, soit 2,1 % de l’électricité utilisée dans le monde.
Une explosion des émissions chez les géants de l’IA
Depuis 2020, les émissions directes (scope 1) et indirectes (scope 2) de quatre grandes entreprises centrées sur l’IA ont bondi de 150 % en moyenne. Ce chiffre traduit l’impact environnemental croissant des opérations d’entraînement et de déploiement des modèles d’intelligence artificielle, souvent très énergivores.
Face à cette évolution, Doreen Bogdan-Martin, Secrétaire générale de l’UIT, rappelle que « l’industrie est consciente du défi » et que des efforts concertés sont nécessaires pour maintenir la dynamique de réduction de l’empreinte carbone.
Une transparence et des engagements en progrès
Le rapport note malgré tout des avancées sur le plan de la transparence et de l’engagement climatique. En 2024, huit entreprises ont obtenu un score supérieur à 90 % dans l’évaluation de leurs stratégies de durabilité, contre seulement trois l’année précédente.
Près de la moitié des entreprises évaluées se sont fixées des objectifs de neutralité carbone. Parmi elles, 41 visent une échéance à 2050, tandis que 51 se sont engagées sur des délais plus courts. Le recours aux énergies renouvelables progresse également : 23 entreprises fonctionnaient entièrement avec des sources vertes en 2023, contre 16 un an plus tôt.
Vers une stratégie climatique alignée sur la science
Pour l’UIT, ces efforts restent néanmoins insuffisants au regard de l’ampleur du problème. Le directeur du Bureau de développement des télécommunications, Cosmas Luckyson Zavazava, souligne que « malgré les avancées, les émissions continuent de croître », appelant les entreprises à adopter des stratégies climatiques rigoureuses, transparentes et scientifiquement fondées.
À l’approche de la COP30, le rapport insiste sur la nécessité pour les acteurs du numérique d’intégrer pleinement les considérations climatiques dans leurs plans de développement. La durabilité du secteur passe désormais par une accélération de la transition énergétique, l’adoption massive des énergies renouvelables et une redéfinition des priorités dans la conception même des technologies.
L’IA, moteur de progrès, pourrait aussi devenir un levier d’innovation pour un numérique plus sobre, à condition que les entreprises technologiques prennent la mesure de leur responsabilité environnementale.
Source News.un.org