Pour accélérer sa transition énergétique, le Maroc s’apprête à adhérer au mécanisme de compensation carbone de l’Accord de Paris. Ce projet, en phase finale de préparation, vise à intégrer le Royaume dans le marché mondial du carbone.
Le principe du marché carbone repose sur la vente de crédits carbone par des porteurs de projets verts à de gros pollueurs, permettant ainsi de financer des initiatives réduisant les émissions de gaz à effet de serre (GES). Les États pollueurs peuvent ainsi soutenir des projets dans des pays émergents, contribuant à la décarbonisation globale.
Actif depuis le protocole de Kyoto en 1997, le marché carbone va désormais inclure le Maroc. Une consultation avec le secteur privé sera prochainement lancée pour expliquer le fonctionnement du marché et les critères d’éligibilité, selon Nacif Safouane, responsable du projet. Cela permettra de recueillir des informations sur le terrain et de sélectionner des projets pilotes.
L’Accord de Paris, signé en 2016 par 193 pays, a introduit ce système de compensation, détaillé dans son article 6, permettant une coopération volontaire entre pays pour réduire les émissions de CO2. Le Global Green Growth Institute (GGGI) aide les signataires à mettre en œuvre ces programmes. Depuis 2015, le GGGI collabore avec le ministère de la Transition énergétique et du Développement durable du Maroc, identifiant deux cadres prioritaires pour la compensation carbone : la loi 40-19 sur les énergies renouvelables et la loi 82-21 sur l’autoproduction.
Les projets éligibles peuvent obtenir des financements en vendant des unités équivalentes à une tonne de CO2 évitée, via un système d’incitation basé sur la production (SIP). Les paiements sont basés sur les résultats vérifiés de manière indépendante, rendant les projets d’énergie renouvelable plus attractifs. Les subventions varient en fonction du prix de la tonne de CO2 évitée et des caractéristiques des projets.
Pour réussir, le Maroc doit trouver des acheteurs pour ses crédits carbone. La Norvège, partenaire probable grâce à un accord de coopération signé en décembre 2023, pourrait être l’un des premiers acheteurs. Le pays scandinave, grand exportateur de gaz et de pétrole, vise à réduire ses émissions de CO2 de plus de moitié d’ici 2030 et à atteindre la neutralité carbone d’ici 2050.
Le programme DAPA représente une opportunité unique pour le Maroc de lever des financements additionnels, dépassant l’objectif de 52% d’énergies renouvelables d’ici 2030. Le ministère de la Transition énergétique estime que les investissements nécessaires devraient atteindre 1 milliard de dollars par an jusqu’en 2030, et 1,9 milliard de dollars par an au-delà. L’instauration d’un marché carbone pourrait aider à combler ce déficit de financement.
Nacif Safouane, chef du programme Marchés du carbone du GGGI au Maroc, souligne que le programme DAPA se distingue par son approche novatrice, visant à réduire les coûts de transaction par rapport aux projets individuels du Mécanisme de Développement Propre (MDP) du protocole de Kyoto. En se concentrant sur des politiques nationales et en simplifiant les procédures administratives, le DAPA facilite la mise en œuvre de projets d’énergie renouvelable.
Les estimations indiquent que le potentiel de réduction des émissions de CO2 d’ici 2030 pourrait atteindre 6 millions de tonnes grâce au programme DAPA, contribuant de manière significative aux objectifs climatiques du Maroc et à sa transition énergétique durable.
Avec L’Opinion